Comment la Russie essaie de détruire la culture Ukrainienne
Ceci est une interview de notre invitée, Anastasiia Marushevska, consultante en communication, auteur, journaliste et ancienne directrice de communications de Reface.
A travers l Histoire, il existent plusieurs exemples de dictatures, de terroristes et de criminels de guerre qui ont attaqués les sites de patrimoine culturel pour tenter de conquérir plus rapidement des civilisations et d’éradiquer leur identités culturelles. Par exemple, le nettoyage délibéré ethnique et la destruction des bibliothèques et musées durant la guerre Bosniaque ; les Talibans détruisant le patrimoine des artefacts Bouddhistes en Afghanistan ; ISIS attaquant la majorité des sites religieux et monuments en Syrie et en Irak. Tout cela dans un effort pour éradiquer un patrimoine culturel unique et démolir tous signes multiculturels.
Les forces Russes en Ukraine emploient actuellement une tactique similaire. Elles détruisent des musées et des théâtres en les qualifiant de « bases militaires Azov ». Ce n’est pas nouveau. En Ukraine, Nous avons déjà vu à la fois des attaques sauvages contre le patrimoine culturel et également un nettoyage culturel délibéré. Pendant des siècles, nos intellectuels ont été persécutés et agressés, et nos sites d’histoire culturel ont été attaqués et détruits par la Russie sous différents prétextes. Il ne peut y avoir aucune conversation entre l’Ukraine et la Russie en tant que nations fraternelles parce que nous, Ukrainiens, avons du faire revivre à plusieurs reprises notre culture à partir des ruines des invasions et persécutions russes.
Je suis née dans la partie centrale de l’Ukraine en septembre 1991, un mois après que nous ayons obtenu notre indépendance. Ma famille entière parlait Ukrainien ; je ne suis jamais passé au Russe, sauf dans les cas où il n’y avait pas d’autres moyens de communications. Pas par haine mais parce que la langue et la culture russe ne me sont pas maternelles.
J’ai grandi dans un environnement où l’éducation comptait beaucoup. J’ai commencé à lire à l’âge de trois ans, à l’âge de neuf ans je suis passé d’une école publique à ce que nous appelons un lycée – une école spéciale (mais encore gratuite) où vous pouviez atteindre l’excellence. Et j’i réussi. Mes principales matières étaient la langue et la littérature Ukrainienne, l’Histoire, le monde de la littérature, l’Anglais et l’Allemand. Nous avions même une matière séparée appelée « la littérature de la diaspora Ukrainienne » qui nous a aidé à approfondir l’exil de l’élite Ukrainienne.
J’ai appris que l’exil n’atait pas le pire scénario. Plus horrible étaient les exécutions massives d’auteurs, artistes, compositeurs, ainsi que leur suicide. L’u des auteurs les plus moderne éminent des années 1920 – 1930, Mykola Khvylovy, s’est tué en mai 1933 avant que les communistes ne puissent l’exécuter. Il était l un des fondateurs et des leaders de VAPLITE – une organisation littéraire qui était parmi les plus connues de la renaissance Ukrainienne dans les années 1920. L’idée principale de VAPLITE était la résurrection des traditions littéraires et de notre nation en général, éloignant l’Ukraine de l’influence Russe et s’appropriant une approche européenne de la culture et de la philosophie.
Quand vous vous promenez vers le centre de Kyiv, juste en haut de la place Maidan sur la rue Institutska, vous pouvez voir le beau Palais d’Octobre. Dans l’Ukraine moderne, nous y allons pour écouter la musique internationale et Ukrainienne, mais durant le régime répressif de Staline des douzaines de représentants culturels Ukrainiens ont été torturés et assassinés dans ce lieu. Les premiers ont été les collègues de Khvylovy de VAPLITE, qui ont été suivis par d’autres écrivains, artistes, philosophes, traducteurs, musiciens et chanteurs Ukrainiens. Leurs noms me reviennent en tête à chaque fois que je suis près du Palais d(Octobre : Hryhorii Kosynka, Mykhailo Semenko, Mykola Ivasyuk, Mike Johansen, Ivan et Taras Krushelnytsky. Ils étaient vos Kafka, Camus et Hemingway. Nos Dali, Picasso et Pollock. Mais il ne reste qu’une courte période de cette résurrection culturelle Ukrainienne – leurs lettres and leurs idées cruciales avec lesquelles j’ai grandi.
Il y a quelques années, mes amis et moi sommes allés à une exposition dans un musée national Ukrainien. Elle était dédiées aux compositeurs et artistes des années 1960, qui étaient des dissidents – appelés shistdesyatnyky en Ukraine. En flânant dans les anciens couloirs du musée aux hauts plafonds, nous avons découverts des œuvres fascinantes d’artistes Ukrainiens oubliés tout en écoutant de la musique de la même période. Chaque nouvelle pièce du musée était dédicacée à un seul sujet. Dans une pièce, vous pouviez entendre de la musique enregistrée à la maison avec les voix des personnes. Dans une autre, il y avait un petit orchestre jouant différents arrangements, dont plusieurs étaient joués en Ukraine dans les premiers temps de la décennie. Bien qu’il n’y avait aucune possibilité pour les dissidents de travailler ensemble et de créer une véritable polémique culturelle, les thèmes de leur travail s’alignaient sur les tendances mondiales.
La plupart des dissidents ont survécu en cachant leurs travaux ou en fuyant l’Union Soviétique. Certains d’entre eux furent en constantes fuites durant le régime. Le poète Vasyl Stus était l’un de ces dissidents.Il est mort dans une prison Russe en 1985, n’ayant jamais su qu’il avait été nominé pour le Prix Nobel de littérature. Stus a été un symbole ukrainien de résistance et de volonté depuis plusieurs décennies.
Le travail de ces dissidents ukrainiens se poursuit dans l’Ukraine indépendante.Des éminents auteurs, musiciens et artistes rejoignent la scène culturelle mondiale, mais avec la constante attaque de la Russie, c’est difficile à soutenir.
L’invasion de la Russie en Crimée et dans le Donbas a été suivi par la volonté de démolir l’identité culturelle Ukrainienne de ces régions. La plus célèbre histoire concerne Izolyatsiia, un ancien centre d’art et de fonds culturels, transformé en prison après l’invasion. Des Ukrainiens ont été torturés et tués dans ces murs depuis l’occupation Russe.
« Assassins de l’Esprit » est un terme crée par Christopher Hitchens, lorsqu’il décrit la guerre culturelle qui a commencée par Ayatollah Khomeini en Iran qui a publié une fatwa contre l’auteur Salman Rushdie. Cette guerre se poursuit. Après l’invasion russe à grande échelle en Ukraine en Février, les producteurs de film Ukrainiens, les éditeurs de livres, les manifestations artistiques, les concerts, les compétitions, les prix, les subventions culturelles et les soutiens financiers se sont pour la plupart arrêtés. Nous aurons besoin d’années, si ce n’est de décennies, pour redémarrer notre moteur culturel. Pourtant j’entends encore le monde fétichiser la culture russe au lieu de parler de celle qui est en fait menacée.
J’ai passé ma vie entière à batir une identité culturelle et nationale qui soit incassable. De même que d’autres ukrainiens, nous nous battons contre les méthodes barbares de la Fédération Russe qui utilise des armes de guerres destructives dans la volonté de détruire nos maisons et notre identité. Nous sauvons les musées Ukrainiens et les œuvres d’art sous les bombardements Russes. Nous pleurons sur les ruines des théâtres et des monuments historiques. Nous ne nous sommes jamais posés la question de savoir si notre culture a le droit d’exister, mais d’une certaine manière, il semblerait que le monde continue de s’interroger si nous devrions seulement exister.